Naissances difficiles pour la paroisse et la commune de Lanvéoc


Dans les archives, ce projet de nouvelle circonscription des paroisses du district de Châteaulin du 21 janvier 1792, n'évoque pas du tout Lanvéoc. Cependant le 6 pluviôse an Vi (28 janvier 1798), l´agent National Savina préconisait l´érection de Lanvéoc en commune «Lanvéoc est un lieu de passage continuel de soldats, marins, voyageurs et bestiaux de toute espèce».

Dès le 10 octobre 1821 selon, probablement le sous-préfet de Châteaulin  ce passage,  rend indispensable une surveillance et une police ».

Une ordonnance royale institue un poste d'adjoint au maire de Crozon pour le port de Lanvéoc. En fait la police était déjà exercée dans ce port par François Jamault, commerçant et blatier à Lanvéoc, mais il avait des difficultés à se faire rembourser les frais occasionnés par sa fonction et surtout "cette délégation à l'autorité municipale ne lui donnait aucun caractère légal et ne lui conférait pas de droit de requérir à la force armée, ni de rédiger des procès verbaux.

François Jamault conserve en fait ce poste pendant près de 20 ans, démissionnait à regret le 25 janvier 1851pour raison de santé. Lui succédèrent : Tanguy Meillard, cultivateur, Jean-Baptiste Duchon puis  en 1861 Jean-Claude Gaonach cultivateur au Hellen, déjà conseiller municipal.

Le 27 juin 1830, à l'occasion des travaux de réalisation du cadastre, Dessaux géomètre en chef écrit au directeur des contributions directes afin de proposer le démembrement de la commune de Crozon (10 720 ha) :

« On rendrait un important service à la population de l´Est si on composait une commune dont le chef-lieu serait Lanvéoc, grand village de 328 habitants et possédant une église. Ce bourg, situé à l´extrémité de la route royale de Lorient à Brest par Concarneau, reçoit les voitures publiques et à besoin d´une administration et d´une bonne police. Il est probable que son érection en chef-lieu de commune favoriserait son accroissement ».

Débarquant à Lanvéoc le 12 novembre 1843 pour une étude archéologique  Bachelot de la Pylaie, archéologue, botaniste, antiquaire écrit au préfet le 3 janvier 1944 :

« Parce que je viens de Paris et que je m'occupe de nos monuments antiques, les habitants de Lanvaux se sont imaginés que je pouvais être puissant auprès du Gouvernement, et leur être utile. Je décline complètement leur opinion, mais aimant toujours à me rendre utile à mont pays, je me suis fait un devoir d'accueillir toutes les demandes et d'être l'interprète des sollicitations auprès de l'autorité supérieure ». Il indique entre autre " Il y a plus d'une lieue et demie de distance d'un endroit à l'autre et la route y est mauvaise, il n'y en a point de plus abandonnée dans toute la bretagne !". Afin d'équiper la nouvelle commune il propose d'y construire une halle faisant office à l'étage de Mairie , d'école et de caserne.

A l´évêque, ancien recteur de Saint-Louis à Brest, Mgr Graveran (1793 -1855) qui selon ses mots, connaît parfaitement le pays, il rappelle que cette démarche est urgente :

" dans l´intérêt de la religion, parce que Lanvaux est trop près de Brest, véritable Paris moralement, et trop éloigné de Crozon pour que la piété des habitants n´en éprouve de funestes atteintes. Il faut donc un curé  à poste fixe, vous auriez la bonté de laisser aux Lanvauciens M. Férec qui dessert leur église : il est fort aimé de tous»

La requête à ce sujet (en 9 pages !) fut adressée au Ministre de l'Intérieur.

Le Préfet lui répondit qu'une telle demande avait déjà été faite quelques mois auparavant mais qu'il n'avait pas encore été statué sur cette requête car l'instruction n'avait pas été complétée à temps pour être présentée.

 

Après, une nouvelle pétition du 20 octobre 1861, Lanvéoc est érigée en paroisse autonome le 15/08/1862 par décret impérial (malgré l'avis contraire du conseil de fabrique * : En effet, ce conseil avait attiré l'attention sur le cas des villages plus rapprochés de Crozon que de Lanvéoc. Cet avis n'ayant pas été pris en compte, Kervéneuré fut intégré dans la nouvelle paroisse, malgré le refus d ses habitants : "Nous ne serons jamais de cette paroisse ; plutôt que de nous y résigner, nous enterrerons nous même nos morts dans nos champs et nous baptiserons nos enfants". 

* le conseil de fabrique au sein d'une paroisse catholique est un ensemble de personnes (clercs et laïcs) ayant la responsabilité de la collecte et de l'administration des fonds et revenus nécessaires à la construction et entretien des édifices religieux et du mobilier de la paroisse : église(s), chapelle(s), calvaire).


Ténacité et patience des Lanvéociens

 Pierre Monfort, premier  recteur de cette nouvelle paroisse, rejoint bientôt le souci de ses paroissiens de voir  Lanvéoc érigée en commune.

Le 14 février 1864, il s'adresse au Préfet :   "L’antipathie, sans cesse croissante des 2 peuples à jamais séparés, les février  intérêts des Lanvéociens toujours lésés par Crozon et la conduite inexplicable du conseil municipal qui a déclaré, séance tenante que désormais il n'accordera rien  cette succursale, m'ont obligé à entretenir des hommes compétents et désintéressés de la triste position qu'on fait à ma paroisse".


 Théophile de Pompéry Conseiller Général et le Baron de Lacrosse 

le conseillèrent dans ses démarches.


 Le Préfet l'invite alors à engager les pétitionnaires à ne plus différer l'envoi de leur demande. La demande parvient au Préfet le 23 février 1864. Une commission syndicale est élue le 18 mai 1864 afin d'émettre un avis sur ce projet. Son avis est sans surprise : Ressources confisquées au seul profit de Crozon, état déplorable des routes, obligation des actes d'état civil à Crozon, besoin d'instruction, besoin d'un officier d'état civil pour assuré le bon ordre et la sécurité des familles. La commission estime  que "sous la dépendance qui est toute une contrée, le pays ne sortirait pas de l'ignorance et ne saurait progresser en agriculture". En fait la situation paraît s'être dégradée depuis la création de la succursale de Lanvéoc en 1862 et la profonde animosité qu'éprouvent les habitants des villages de Kervéneuré et Clouchouren annexés contre leurs vœux à la succursale de Lanvéoc.

Les Lanvéociens, persévérants et nullement découragés, adresse de nouvelles pétitions le 13 février 1865, le 8 janvier 1866.

Le 22 septembre 1870 ils obtiennent enfin un appuis, celui du Préfet de Police de Paris Emile de Keratry mais il faut encore une nouvelle pétition le 25 août 1871, pour que le >Préfet accepte d'autoriser une nouvelle instruction. En 1862 la succursale de Lanvéoc comptait 1 300 habitants dont 394 au bourg et le reste réparti en 42 villages. Lanvéoc possède huit bateaux de transports, deux douanes de terre et de mer, six auberges, trois magasins de blé, deux boulangeries, cinq épiceries avec un bureau de tabac, quatre belles foires l'an, un chantier de menuiserie et de calfatage, deux magasins de toile, coton et drap et deux écoles séparées suivies par près de cent élèves. Désormais elle compte treize auberges et un hôtel. La localité fournit un grand nombre de matelots à l'Etat et d'ouvrier au port maritime de Brest. 

Un événement joue en fait en faveur des Lanvéociens : l'église, l'antique chapelle Saint-Anne, a été fermée, par décision préfectorale du 23 mars 1870 pour sécurité publique. Elle est même "rendue désormais irréparable par la tempête violente du 26 au 28 septembre 1871". L'office divin se déroule donc dans une écurie "local si malsain, trop écrasé et trois fois trop étroit".

La commission syndicale du 15 octobre 1871 propose donc la séparation afin que Lanvéoc puisse employer ses ressources à la reconstruction de l'église mais aussi à l'amélioration des routes et des écoles. Le conseil municipal de Crozon, peut être lassé par tant de persévérance, vote majoritairement en faveur de l'érection de Lanvéoc, mais en séparant toutefois le village de Kervéneuré, ce que consent à regret Lanvéoc le 27 février 1872. 


Lanvéoc va enfin devenir une commune ! 

 (en cliquant sur ce lien, vous retrouver l'article de presse du 8 avril 1872) .

Le 18 juillet 1872, le préfet du Finistère Armand Pihoret

signe enfin un arrêté portant création de la commune de Lanvéoc.


sources https://patrimoine.region-bretagne.fr/gertrude-diffusion/dossier/presentation-de-la-commune-de-lanveoc/49991be0-e8cf-4f37-8658-1a44bda7f311

Didier Cadiou  - Avel Gornog N° 7 Juin 1999 - site : notrepresquile .com